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TRIBUNE : Hébergement d’urgence, «Face à l’inacceptable, exigeons la mise à l’abri»

Publié le : 15/04/2019

le parisien

 

Dans une tribune au Parisien - Aujourd’hui en France, les acteurs de la solidarité demandent un plan national pour créer 40 000 places supplémentaires en centre d’accueil et d’hébergement d’urgence spécialisé.

« La fin de la trêve hivernale annonce la reconstitution de campements insalubres occupés par des personnes sans domicile fixe, souvent migrantes, dans les grandes métropoles. Cette crise humanitaire n’est pas nouvelle. Depuis de longs mois, nous constatons la présence de plus d’un millier de personnes vivant dans des conditions sanitaires et sociales déplorables le long du périphérique dans le nord-est de Paris. Toutes celles et ceux qui interviennent au quotidien pour tenter de répondre aux besoins vitaux d’hygiène, d’alimentation et de santé ne peuvent empêcher l’aggravation de la situation et des dangers pour ces populations qui vivent dans un dénuement total. Près de 15 % de ces personnes sans abri ont obtenu le statut de réfugié : leur remise à la rue faute de solution de relogement est incompatible avec notre devoir de protection. Ces campements se sont également développés dans d’autres villes métropoles comme Nantes, Lyon, Toulouse, Lille ou Marseille confrontées à une très forte saturation du parc d’hébergement.

Face à l’inacceptable, nous demandons une mise à l’abri immédiate, avec un accompagnement social et sanitaire pour tous avant que la situation ne dégénère. Et nous rappelons qu’aucune personne — ou famille — ne devrait être contrainte de quitter son lieu d’hébergement sans qu’une solution digne ne lui soit proposée.

Mais il faut aussi s’attaquer aux racines de la crise pour sortir de l’urgence et de la répétition des évacuations. La France a accueilli, en 2018, 122 000 demandeurs d’asile, chiffre en progression. Malgré l’obligation faite aux États de proposer des conditions matérielles d’accueil dignes pendant le temps de la procédure, seulement 50 % des demandeurs d’asile obtiennent un hébergement dans un dispositif national d’accueil constitué de seulement 86 500 places d’accueil en fin d’année 2018.

Le gouvernement prévoit bien de créer 5 500 places nouvelles pour les demandeurs d’asile et réfugiés en 2019, une avancée très en deçà des besoins constatés sur le terrain et qui ne comble pas le déficit structurel de places d’accueil. Nous demandons un plan national de création de 40 000 places d’accueil supplémentaires en centre d’accueil pour les demandeurs d’asile (Cada) et d’hébergement d’urgence spécialisé (Huda) sur deux ans, réparties de manière équilibrée sur l’ensemble du territoire national et sur les grandes métropoles.

Cet objectif est atteignable grâce à la mobilisation de tous : l’État qui doit mettre en œuvre le droit d’asile, les collectivités locales qui doivent proposer des sites d’accueil et les associations qui s’engagent dans l’accompagnement social et juridique. Il faut aussi renforcer et créer de nouvelles plates-formes de premier accueil, prioritairement dans les grandes villes, en capacité d’évaluer la vulnérabilité des personnes et de les orienter rapidement vers des lieux d’hébergement et vers les guichets d’enregistrement de l’asile, en capacité suffisante pour les accueillir et ouvrir leurs droits.

Le processus de Dublin est à l’évidence créateur d’immenses problèmes tant pour la puissance publique que pour les personnes migrantes et les populations. Nous souhaitons que les États membres repensent ces dispositifs afin de leur rendre humanité et équité. Enfin, notre pays doit assumer l’accès à un titre de séjour des ménages hébergés depuis plusieurs années, qui ne seront pas reconduits et qui ne peuvent sortir de la précarité faute de ressources, d’accès à l’emploi et au logement.

L’errance des demandeurs d’asile, migrants et réfugiés n’est pas digne de la France, sixième puissance économique mondiale. Agissons ensemble pour éviter de nouvelles crises humanitaires aux portes de nos villes. »

 

Par Louis Gallois (président de la Fédération des acteurs de la solidarité) ; Arthur Anane (Fédération des acteurs de la solidarité Ile-de-France) ; Laurent Desmard (Fondation Abbé Pierre) ; Thierry Le Roy (France terre d’asile) ; Pierre Coppey (Aurore) ; Marie-France Eprinchard (Emmaüs Solidarité) ; Jean-Francois Carenco (Coallia) ; Jean-Jacques Eledjam (Croix-Rouge française) ; Isabelle Richard (Fédération Entraide protestante) ; Malik Salemkour (Ligue des droits de l’homme) ; Eric Pliez (Samu social de Paris) ; Patrick Doutreligne (Uniopss) ; Hubert Trapet (Emmaüs France) ; Philippe de Botton (Médecins du monde) ; Daniel Naud (Fondation Armée du salut) ; Marie-Hélène Franjou (Amicale du nid) ; Christophe Deltombe (Cimade) ; Nicolas Noguier (le Refuge)

 

Le Parisien, le 14/04/2019