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Le difficile parcours des demandeurs d'asile

Publié le : 08/12/2014

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cada-chatillonEntretien au Cada de Châtillon (Hauts-de-Seine) le 4 décembre 2014 ( AFP / )

 

"On m'a menacée de mort, poursuivie, j'ai des cicatrices dans le dos": à voix basse, la femme vêtue d'une polaire raconte le parcours qui l'a menée de Kinshasa à Châtillon, où les salariés de France Terre d'Asile l'épaulent dans le long parcours vers le statut de réfugié.

Elle retrace une histoire complexe de délation, de traque, de fuite sur un vol d'une compagnie africaine. L'émotion la submerge lorsqu'elle parle de ses enfants qu'elle n'a pas vus depuis son départ.

"À peu près 20% des gens qui arrivent présentent des symptômes de psycho-traumatisme, liés à la proximité avec la mort", explique Caroline Toklu, chef de service du centre d'accueil pour les demandeurs d'asile (Cada) de Châtillon (Hauts-de-Seine), où 125 demandeurs d'asile sont pris en charge. "Certains l'expriment, d'autres non. Le silence est parfois un signal d'alerte".

Pour les arrivants, le centre est une étape cruciale dans la demande d'asile. C'est là qu'ils reçoivent leur courrier, là que des bénévoles leur donnent des cours de français, là aussi qu'ils vont obtenir un logement.

Les chances d'obtenir l'asile sont aussi beaucoup plus importantes pour les demandeurs en Cada que pour les autres. "À Châtillon, on est à 60% de taux de reconnaissance, contre 20/25% d'une manière générale", explique Guillaume Schers, le directeur du centre.

Mais cette chance n'est pas donnée à tous. Les structures actuelles offrent moins de 25.000 places en Cada, alors que 66.000 demandes ont été déposées l'an dernier. L'attribution se fait largement selon des critères de vulnérabilité (présence d'enfants, traumatisme, grossesse...) Les autres sont accueillis par l'hébergement d'urgence, voire laissés à eux-mêmes, avec une allocation pour se loger.

 

- Passer de deux ans à neuf mois -

L'un des enjeux de la réforme du droit d'asile, qui sera examinée à partir de mardi à l'Assemblée, est de désengorger le système, notamment par l'accélération des procédures, censées passer de deux ans à neuf mois d'ici 2017. Le ministre de l'Intérieur a également annoncé la création de 5.000 places en centre l'an prochain.

À Châtillon, les demandeurs viennent de Tchétchénie, de République démocratique du Congo, de Guinée... Certains obtiendront l'asile très vite (les Syriens ont un taux d'acceptation de plus de 90%). Pour d'autres, le parcours sera plus long, avec d'abord un passage à la préfecture pour donner leurs empreintes et retirer un dossier, ensuite un entretien à l'Ofpra (Office français de protection des réfugiés et des apatrides) puis, si leur dossier est rejeté, un recours devant la CNDA (Cour nationale du droit d'asile).

Dans ce parcours très balisé, les 260 Cada, en grande majorité gérés par des associations, aident les demandeurs à mettre toutes les chances de leur côté.

"Certains parlent de choses triviales et pas de l'important. On peut avoir des gens qui disent j'ai fait ceci, cela, oh et puis j'ai été torturé, j'ai quatre enfants et je suis ici depuis un an", raconte M. Schers.

Le silence peut s'expliquer par un traumatisme -- il n'est jamais facile de parler de viols -- ou, plus simplement, parce que les demandeurs n'ont pas conscience de ce qui fera mouche.

L'attribution du statut de réfugié correspond en effet à des critères très précis, régis par la Convention de Genève, et basés sur la crainte réelle de persécution. Les demandeurs peuvent être aussi admis au titre de la protection subsidiaire (risques de mort ou torture, menaces...)

 

Pour accéder à la vidéo, cliquez ici.

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Ce sont ces critères qu'il faut mettre en avant. Mais face aux suspicions de fraude, les travailleurs sociaux recommandent aussi aux demandeurs de retrouver dans leur mémoire le détail, la petite touche attestant qu'ils ne régurgitent pas un discours pré-formaté.

Guillaume Schers donne l'exemple de cette opposante qui, dans son dossier, "disait qu'elle participait souvent en tant que responsable politique à des matchs de foot. Eh bien, la question qui lui a été posée, c'était la couleur des maillots de différentes équipes". La femme a su répondre, "et c'est ce qui, certainement, lui a permis d'obtenir le statut de réfugié".

 

Boursorama, le 07 décembre 2014.