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Ali, 36 ans, Iranien et premier "réfugié" gay en Espagne

Le premier étranger à obtenir le droit d'asile en Espagne en raison d'une "persécution pour (son) orientation sexuelle"

 

Au téléphone, Ali a seulement annoncé à sa mère qu'il avait "les papiers". Cet Iranien de 36 ans n'a pas précisé qu'il est, depuis lundi 14 décembre, le premier étranger à obtenir le droit d'asile en Espagne en raison d'une "persécution pour (son) orientation sexuelle". Désormais, ce motif est explicitement prévu dans la nouvelle loi sur le droit d'asile adoptée il y a quelques semaines.

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La famille d'Ali restée en Iran ignore son homosexualité, elle n'a jamais su pourquoi ce fils apparemment sans problème, qui travaillait dans une agence pour l'emploi, avait brutalement quitté le pays, il y a un an. Jusque-là, Ali - un pseudonyme par peur de représailles envers les siens - n'avait eu d'autre choix que de taire son secret, et de vivre son couple dans la clandestinité. L'Iran est l'un des neuf pays au monde qui punissent de mort l'homosexualité.


A l'automne 2008, la police a fait une descente dans une fête d'anniversaire, discrètement organisée par la communauté gay dans un appartement de Téhéran. Arrêté, frappé et insulté, il n'a été libéré qu'au bout d'une semaine grâce à la caution payée par son compagnon. A l'époque, une douzaine d'homosexuels venaient d'être condamnés à la peine capitale, au rang desquels Nemat Safavit, un adolescent arrêté à l'âge de 16 ans. Ils sont en attente de leur exécution, en dépit des nombreuses protestations internationales auprès du gouvernement iranien.


Subterfuge


Alors Ali a fui en investissant toutes ses économies, soit l'équivalent de 9 000 euros, dans un visa espagnol fourni par des mafias. Aussitôt débarqué à l'aéroport de Madrid-Bajaras, en décembre 2008, il a demandé l'asile politique. Ce n'est pas la première fois qu'un homosexuel (ou un transsexuel), persécuté dans son pays, est accueilli en Espagne, mais jusque-là il fallait utiliser un subterfuge, le cas n'étant pas reconnu par la loi.


A Malaga (Andalousie), où il vit dans un centre d'accueil pour réfugiés, Ali est aidé par l'antenne locale de la fédération homosexuelle Colegas. "Nous sommes sa nouvelle famille et nous allons l'aider en lui reversant la totalité du produit de la loterie que nous organisons traditionnellement à Noël", révèle son président, David Cedeno. Dès le 2 janvier 2010, Ali sera libre. "Après trente-six ans de prison", soupire-t-il. Libre, et à la recherche d'un travail et d'un logement.


Jean-Jacques Bozonnet
Le Monde, le 16 décembre 2009