fbpx
Main menu

Binationalité : "Une très vieille rengaine"

le-jdd

Lundi, dans un entretien à La Croix, le député UMP Claude Goasguen a indiqué vouloir "limiter" la binationalité, en créant notamment un "registre" spécifique.

"C'est un positionnement purement personnel", explique au JDD.fr la socialiste George Pau-Langevin, membre de la mission d'information parlementaire sur le droit de la nationalité, dont le maire du 16e arrondissement de Paris est rapporteur.

Se dirige-t-on vers une remise en question de la binationalité* ? C'est en tout cas ce que suggère le député UMP Claude Goasguen, dans un entretien publié lundi dans La Croix, qui souhaite non pas la supprimer, mais bien la "limiter". Première étape pour le maire du 16e arrondissement de Paris : créer un registre des binationaux, qui seraient "sans doute 4 à 5 millions" en France. Mais le rapporteur de la mission d'information parlementaire sur le droit de la nationalité va plus loin : "On demanderait aux gens de choisir entre deux nationalités. Ou bien qu'on aille vers une limitation des droits politiques".

Sauf que ces propos ne semblent pas satisfaire les membres de la mission parlementaire en place. "C'est un positionnement purement personnel" de Claude Goasguen, explique en effet au JDD.fr la député socialiste George Pau-Langevin. "Il représente sûrement son groupe politique, mais je n'ai jamais entendu ce type de propos au sein de la mission", poursuit l'élue du 20e arrondissement de Paris, qui tient à préciser que les députés de la majorité – qui avaient d'ailleurs "réclamé" cette mission – ont peu à peu "déserté" les réunions. George Pau-Langevin dénonce également "l'obsession" qu'a la majorité à "ficher les gens". "Les débats promettent d'être assez animés" conclut la député.
"

Cela va déraper, c'est certain"

Pourtant, dans l'entourage de Claude Goasguen, on assure que ces mesures sur la binationalité – tout du moins "une grosse partie" – se "retrouveront certainement dans le rapport". Avant de relativiser : "Ce sont des pistes de travail. Ce n'est pas un compte-rendu exact des pistes" qui seront avancées, car le "rapport sera plus large". Composée de quinze membres (8 UMP, 4 PS, 1 Nouveau Centre, 1 Gauche démocrate et républicaine et 1 non inscrit) et présidée par le socialiste Manuel Valls, cette mission a été créée en octobre 2010 lors du débat sur le projet de loi sur l'immigration. Elle doit rendre ses conclusions fin mai.

Du côté des associations, la réaction est vive. Quoique presque désabusée. "C'est une très vieille rengaine. On entendait déjà cela dans les discours d'extrême-droite après la Première guerre mondiale", déclare Serge Slama du Gisti (Groupe d'information et de soutien des immigrés), joint par leJDD.fr. "Cela n'a aucune chance de voir le jour. Elle ne sera jamais mise en œuvre, c'est impossible juridiquement", ajoute-t-il, car contraire à la Convention européenne des droits de l'Homme. Avant de rappeler que dans la grande majorité des cas, on "ne choisit pas" d'avoir la double-nationalité.

"Si on pouvait arrêter ce débat permanent autour de l'origine des personnes, on rendrait un grand service au 'bien-vivre ensemble'", renchérit pour sa part le directeur général de France terre d'asile, Pierre Henry, qui estime que cela fait des années que cette question de la double allégeance revient épisodiquement sur le devant de la scène. "Je vous renvoie à Jean-Marie Le Pen demandant à Rachida Dati si elle avait aussi la nationalité marocaine… ", précise-t-il. Avant de se dire opposé davantage sur la forme que sur le fond aux propos de Claude Goasguen. "Qu'il y ait des débats sur la binationalité, pourquoi pas ?", explique-t-il au JDD.fr. Avant de conclure : "Le débat ne doit pas être posé maintenant, alors que la France vit dans un climat nauséabond. Cela va déraper, c'est certain".

* La France considère le double national – qui appartient simultanément à la nationalité de deux États – comme titulaire de l'ensemble des droits et obligations attaché à la nationalité française, qu'il s'agisse d'un Français ayant acquis une autre nationalité ou d'un étranger devenu français.

Le JDD, le 09/05/2011