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"Brisons les tabous de l’excision"

Publié le : 07/02/2014

Dans le monde aujourd’hui, l’excision est pratiquée dans 29 pays d’Afrique et du Moyen-Orient ainsi que dans certaines communautés d’Asie, selon l’enquête Excision et Handicap (INED, 2007-2008). 125 millions de femmes seraient excisées dans le monde, dont 55 000 vivraient en France.

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Source: GAMS Belgique, 2008.

 

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, les Mutilations Sexuelles Féminines (MSF) recouvrent « toutes les interventions incluant l’ablation partielle ou totale des organes génitaux externes de la femme ou autres lésions des organes génitaux féminins pratiquées pour des raisons non-médicales ».

Le jeudi 6 février 2014, lors de la journée internationale contre les mutilations sexuelles féminines, l’association « Excisions Parlons-en !» a organisé un rassemblement inédit d’actrices et d’acteurs de la société civile : associations, ONG, institutions nationales et internationales, journalistes, médecins.   

 

Impliquer les communautés et les diasporas pour qu’elles deviennent des agents du respect des droits humains

« L’accès à l’éducation pour les filles est la pierre angulaire de la lutte contre les violences et mutilations faites aux femmes » - Micelèle Barzach, présidente de UNICEF France.

Le professeur Gamal Serour, directeur du centre islamique international de l’Université Al-Azhar au Caire en Egypte, a clarifié l’amalgame souvent présent dans les esprits entre l’excision et l’islam. Il a rappelé que l’obligation d’excision ne figurait nulle part dans le Coran, mais aussi l’importance d’informer et de sensibiliser les leaders religieux car leur rôle au sein des communautés est primordial.


De plus, l’implication de la diaspora est essentielle dans le processus. En Ile-de-France, l’association Equilibres & Populations intervient auprès de la diaspora malienne en partenariat avec l’association Entraide et Espoir. La place des « migrants relais » est primordiale dans la prévention, lorsqu’ils retournent dans leur pays d’origine pour sensibiliser leur communauté au problème des MSF. Ils sont écoutés et respectés. Selon Aurélie Hamelin-Desrumaux, coordinatrice du projet « cela a eu un impact fort sur les changements de comportements dans les villages ».


Une question de santé publique

La Docteure Emmanuelle Piet est revenue sur la longue bataille que mènent depuis 30 ans les Protection Maternité Infantile contre les MSF. Elle a rappelé le rôle clef que peuvent jouer certaines personnes, des maitresses d’écoles qui ont pu  éviter l’excision de petites filles en signalant en amont des comportements révélateurs. Elle a aussi rappelé l’importance des mots dans un sujet qui reste encore très tabou « le droit à la sexualité des femmes ». Les témoignages de nombreuses femmes, disaient tous la même chose « en fait ça, je ne l’ai pas voulu ».


En effet, selon l’UNICEF, dans la plupart des pays où sont pratiquées les MSF, la majorité des femmes et des hommes pensent que cette pratique devrait cesser. Au Bénin environ 95 % des personnes ayant connaissance de ces pratiques pensent qu’elles devraient cesser.


Le docteur Pierre Foldes a quant à lui expliqué les progrès de la médecine en matière de « reconstruction » suite à des MSF. Cependant, il faut rester prudent et ne pas médiatiser cette chirurgie réparatrice afin de ne pas créer d’effet pervers. Le docteur Morrissanda Kouyaté, directeur du Comité InterAfricain de lutte contre l’excision a révélé la part de responsabilité des médecins occidentaux dans la médicalisation massive des pratiques de MSF.  En Egypte, 72 % des excisions sont pratiquées par le corps médical.


Droit d’asile et excision

fatiha-mlatiFatiha Mlati directice de l'intégration de France terre d'asile; José Fischel De Andrade administrateur principal chargé de la protéction du HCR en France; Fadela Novak, administratrice principale du bureau Europe du HCR

 

Chaque année environ 20 000 femmes et filles demandent l’asile dans l’Union européenne en provenance de pays pratiquant les MSF. La France, avec 4 000 réfugiées, est le principal pays d’accueil de ces femmes et le premier pays à avoir criminalisé cette pratique en 1985.

Fatiha Mlati, Directrice de l’Intégration de France terre d’asile a évoqué le fait qu’au départ, en France, les MSF n’étaient pas considérées comme motif de persécution pouvant justifier une l’octroi d’une protection internationale.  Ce n’est qu’en 2012 que le Conseil d’Etat a reconnu que le risque d’excision pour une femme, dans son pays d’origine, était un motif légitime de demande d’asile. Le droit au séjour des parents des jeunes filles a, quant à lui, été accordé en avril 2013.

Fatiha Mlati a souligné le fait qu’il manquait encore des lignes directrices claires. « Il faut absolument préserver l’équilibre familial car cela représente un double isolement, celui de l’exil et celui du  positionnement contre sa culture. » De plus, il faut former et sensibiliser le personnel de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra) sur cette question afin que leur accueil soit plus adapté aux victimes de ce traumatisme. Un suivi psychologique de ces femmes est indispensable lors de leur arrivée. Suite au choc provoqué par les MSF elles s’enferment souvent dans le silence.