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Loin de leur famille, ces adolescents exilés espèrent un avenir en France

tv5 monde

Ils sont âgés de 16 ou 17 ans, ont traversé la Méditerranée sans leur famille, mais ils préfèrent ne rien dire des violences qu'ils ont fuies: pour ces adolescents hébergés à Boissy-Saint-Léger, la priorité est à la formation, pour trouver un travail qui leur ouvrira un avenir en France.

"Je suis la seule fille ici, c'est un peu difficile mais ça va, les autres me traitent comme leur soeur", explique Anissa, Comorienne de 16 ans, hébergée au Centre Stéphane Hessel pour mineurs isolés étrangers géré par France terre d'asile, dans cette petite ville du Val-de-Marne.

Anissa -- les prénoms ont été changés -- s'apprête à faire sa rentrée à Vitry, à une quinzaine de kilomètres, dans un collège qui l'accueillera en classe d'adaptation. "C'est loin mais je n'ai pas le choix", explique la jeune fille. "Je veux m'occuper d'enfants en crèche, et pour cela il faut beaucoup travailler, faire des stages".

Ils sont une trentaine à avoir trouvé refuge au centre -- Afghans, Congolais, Maliens ou Nigériens, avec généralement des "parcours migratoires très longs", explique le directeur du centre, Jean-Michel Pollyn.

"Quand ils arrivent ici, ils n'ont plus de soutien dans leur pays", assure M. Pollyn. "Parfois ils n'ont plus du tout de famille à cause des guerres", d'autres "savent que leur mère a été remariée de force au pays, ils n'ont pas de nouvelles et cela les mine". Et la tâche est complexe, pour aider ces jeunes qui "parlent peu de leur passé", ajoute-t-il: "éduquer un être humain qui a fui dans des conditions de violence et de misère, c'est très compliqué".

Dans ce centre fondé en 1999, les adolescents sont logés, nourris, et soutenus dans leur cursus scolaire après une remise à niveau si nécessaire.

"Tous sont motivés pour s'intégrer", assure M. Pollyn. Mais "pour s'intégrer il faut être autonome et avoir une formation. Et quand on n’a pas de famille, il faut des centres spécialisés", martèle ce cinquantenaire aux convictions républicaines solidement ancrées.

Sur les 8.000 mineurs isolés étrangers présents en France (selon les estimations des associations), seule une infime minorité bénéficiera d'un suivi en centre spécialisé (France terre d'asile en gère cinq au total).

- "Course contre la montre" -

Comme beaucoup, Ousmane a dans un premier temps été hébergé en famille d'accueil, à Arles. Mais la cohabitation s'est mal passée et il a été orienté en région parisienne où la priorité est de continuer sa scolarité.

"Même si c'est à deux heures d'ici, j'y vais. L'important est de trouver un lycée", explique ce garçon rieur, qui s'est bien plu en seconde professionnelle "électricité" l'an dernier.

Ousmane n'a pas de gros problèmes de langue. Il a fréquenté l'école sept ans au Mali, et s'ennuie un peu, au fond de la classe où ses camarades s'initient au français, devant ses feuilles recouvertes d'une écriture impeccable.

Mais à quelques jours de la commission d'attribution des places, des pièces manquent encore à son dossier. Et dans son cas, ce n'est pas simplement l'année scolaire qui risque d'être perdue, explique Djoura Yahi, la responsable de l'insertion professionnelle du centre.

L'adolescent approche des 17 ans. Or "il est crucial que ces jeunes puissent, à 18 ans, faire état d'un parcours scolaire ou professionnel" de six mois au moins, pour entrer dans des dispositifs de formation qui leur ouvriront, à terme, une perspective de régularisation.

Pour Ousmane, Mme Yahi multipliera les coups de fil afin de récupérer les documents. Pour les autres, parfois non francophones, souvent analphabètes, il s'agit surtout de trouver des stages en entreprise, dans ce qui s'apparente à une vraie "course contre la montre" lorsque le couperet des 18 ans se profile.

Boulanger, chaudronnier... le centre Stéphane Hessel se targue de n'avoir jamais laissé personne sur le carreau. Et "ils reviennent ensuite, nous dire où ils en sont, parce qu'on est leur première maison d'accueil et leur première rencontre profonde avec la France, qui est très accueillante en fait", assure M. Pollyn.

Par Claire Gallen, TV5 Monde, le 04 septembre 2015