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La réunification familiale : une procédure difficile pour les personnes LGBTI+

Publié le : 30/03/2023

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© UNHCR/Diego Ibarra Sánchez

Article issu de la Lettre de l’asile et de l’intégration n°99 : L'accueil des personnes exilées LGBTI+, des paroles aux actes.

La procédure de réunification familiale permet aux personnes réfugiées d’être rejointes par les membres de leur famille. Cette procédure, déjà longue et complexe, l’est d’autant plus pour les personnes LGBTI+ qui font face à des obstacles supplémentaires. 

Conformément au cadre juridique européen1, et au Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda)2, les personnes ayant obtenu une protection internationale ont le droit de faire venir leur conjoint ou conjointe et leurs enfants dans le cadre d’une réunification familiale. Dans les faits, cette procédure est particulièrement difficile, les délais d’instruction sont longs, l’information donnée aux familles dans les pays d’origine est insuffisante, et les postes consulaires absents de certains pays.

Au niveau européen, six pays (la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Slovaquie, la Bulgarie et la Roumanie) ne reconnaissent ni le mariage ni l’union civile homosexuels. Une étude du Parlement européen, publiée en mars 2021, a démontré qu’en refusant de reconnaître les couples de même sexe, le cadre juridique de ces pays entraine une violation du droit au respect de la vie privée et familiale pour ces familles3.

En France, la réunification familiale est soumise à certaines conditions. Les liens familiaux doivent être antérieurs à la demande de protection, ils doivent être déclarés à l’Ofpra pendant la procédure de demande d’asile, puis de nouveau mentionnés sur la fiche familiale de référence après l’obtention d’une protection. Le cadre français prévoit des règles assez souples en matière de reconnaissance du couple, y compris sans mariage légal ou union civile, lorsque les liens d’union peuvent être démontrés.

Or, à l’heure actuelle, 69 pays criminalisent l’homosexualité, et les relations homosexuelles sont passibles de la peine de mort dans 11 pays4. Dans ces pays où l’homosexualité est réprimée, le mariage et le concubinage sont interdits et le couple est caché. « C’est le nœud du problème » explique Aude Le Moullec-Rieu, présidente de l’Ardhis (Association pour la reconnaissance des droits des personnes homosexuelles et trans à l’immigration et au séjour) qui ajoute : « c’est très compliqué de faire valoir le droit des couples homosexuels car la survie des personnes dépend justement de l’effacement des preuves de l’existence du couple ». La procédure de réunification familiale n’est donc pas adaptée à la situation des personnes réfugiées LGBTI+ qui font face à des difficultés pour prouver la réalité et la stabilité de leur couple.

Par ailleurs, faire venir ses enfants dans son pays d’accueil pose également problème pour les personnes LGBTI+. Les enfants restés au pays, parfois issus d’un mariage forcé, sont à la garde d’autres membres de la famille, qui peuvent être réticents à l’idée de rendre le ou les enfants. En effet, les personnes LGBTI+ exilées quittent souvent leur pays en raison de violences ou de discriminations homophobes ou transphobes intrafamiliales. Dans certains contextes, les familles considèrent qu’une personne homosexuelle n’est pas apte à être parent et même dangereuse pour ses propres enfants. Or, la procédure de réunification repose sur l’acceptation des proches de procéder à une déchéance et une délégation des droits parentaux au parent ayant reçu une protection en France, ce qui peut représenter un obstacle majeur.

La séparation, la distance et l’attente ne sont pas sans conséquences sur les conditions d’intégration des personnes exilées. La prise en compte de la réalité de ces couples et familles est nécessaire pour le respect de leurs droits fondamentaux et pour sécuriser l’accès à cette voie légale vers l’Union européenne.

(1) CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE, Directive 2003/86/CE du 22 septembre 2003 relative au droit au regroupement familial.
(2) Articles L561-2 à L561-5 du Ceseda.
(3) PARLEMENT EUROPÉEN, Obstacles to the Free Movement of Rainbow Families in the EU, Mars 2021.
(4) OBSERVATOIRE DES INÉGALITÉS, Dans 69 pays sur 193, l’homosexualité est interdite, Novembre 2022.

 

Retrouvez l'intégralité de la Lettre de l’asile et de l’intégration n°99 : L'accueil des personnes exilées LGBTI+, des paroles aux actes !