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France: ces bénévoles qui viennent en aide aux migrants

Publié le : 12/10/2015

RFI presse

Alors que la France peine à gérer l’afflux record de migrants et de réfugiés, depuis plusieurs mois des bénévoles sont investis pour venir en aide aux personnes installées en France. Rencontre avec ces volontaires, heureux de donner de leur temps pour les étrangers en difficulté.

 

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Jean-Pierre Guillotin, bénévole au Secours catholique, accompagne les demandeurs d'asile dans leurs démarches administratives. Ici, avec une interprète bénévole, il cherche à communiquer avec un demandeur d'asile libyen qui ne parle ni français ni anglais. Secours catholique

 

« Nous sommes en sous-effectif, et il y a beaucoup de demandes et d’activités à organiser. » Caroline, rencontrée à l’association France Terre d’asile, à deux pas de la rue Pajol, à Paris, où un camp de migrants a été évacué par deux fois cet été, se sent un peu dépassée par l’afflux de personnes qui arrivent en France.

« Je suis inscrite à quatre associations différentes et je donne sept heures de cours de français langue étrangère et autant pour préparer les leçons », explique cette bénévole depuis un an et demi, qui souhaite rester anonyme. Elle propose aussi, notamment à ses élèves, des visites de monuments ou de musées, ou un accompagnement administratif des personnes qui demandent le statut de réfugié.

Un travail associatif essentiel en France, pays qui passe pour être à la traîne dans l’accueil des réfugiés et l’octroi du droit d’asile. « Angela Merkel est à la tête d’une nouvelle prise de conscience du problème. Mais je ne suis pas sûre que les Français soient prêts à accueillir autant d’étrangers quand on connaît le niveau de chômage et l’inquiétude pour l’avenir de nos jeunes. Je ne sais pas si l’on peut ajouter une nouvelle misère en France », affirme Caroline.

Ancien employé de La Poste, Jean-Pierre Guillotin estime, lui, que la crise des migrants ne peut véritablement se régler que dans les pays d’où ils sont originaires, qui doivent « retrouver un climat de paix ». Responsable depuis début 2014 du service Migrants au Secours catholique de l’Essonne, à Evry, il y est entré comme juriste bénévole en 2013. Il aide des personnes sans-papiers ou qui ont des difficultés à renouveler leurs documents. Une activité qui lui prend trois à quatre jours par semaine. « Je fais une veille quasi-permanente pour me tenir au courant du droit des étrangers, confie-t-il. Mais c’est vrai que, face à l’afflux actuel de migrants, je me sens un peu dépassé. On se sent vraiment petit. »

Descendante de Hongrois et Française intégrée

Malgré l’implication que cela leur demande, ces bénévoles chérissent les moments de partage et d’échange avec leur public. « J’ai beaucoup voyagé autour du bassin méditerranéen et j’y ai rencontré des personnes qui ont des valeurs peut-être oubliées ici, comme l’hospitalité, le respect du plus âgé et du savoir », raconte Caroline.

Jean-Pierre Guillotin a également ressenti cette hospitalité à l’étranger, lorsqu’il a été pendant sept ans fonctionnaire à Ouagadougou, au Burkina Faso, pour un programme de l’Organisation mondiale de la santé. « Je ne compte pas le nombre de fois où des personnes qui vivent de peu m’ont offert quelque chose. » Et, d'une certaine manière, il se sent redevable envers ces étrangers : « Ils apportent de la joie de vivre dans notre pays ! »

Même sentiment chez Caroline qui habite le quartier huppé de Saint-Germain-des-Prés, à Paris. Son grand-père est arrivé de Hongrie, il y a cent ans : « Aujourd’hui, je suis une Française intégrée, j’ai fait des études supérieures et je me dis que j’ai peut-être quelque chose à faire pour les migrants du XXIe siècle. »

La Maison de l’emploi occupée

Jean-Pierre Guillotin confie avoir vécu des « moments forts » dans ses activités : « Lors d’une permanence, un Sénégalais prénommé Ibrahima est venu me voir. Il était depuis onze ans en France et travaillait sous un autre nom pour pouvoir rester dans le pays sans ses papiers. On a constitué un dossier pour qu’il puisse être régularisé. Mais il fallait que son patron lui fournisse un document certifiant qu’il avait travaillé sous un alias. « Ibra » l’a demandé à son chef, qui l’a renvoyé. »

Jean-Pierre Guillotin a soutenu Ibrahima. Avec une centaine de Sénégalais et de Mauritaniens dans le même cas, ils ont monté un collectif, en mai 2014, pour négocier leur régularisation. Ils ont été 113 exactement à occuper la Maison de l’emploi à Longjumeau (Essonne). « Le préfet a donné des garanties et l’occupation n’a duré qu’un jour. Finalement, seules trois personnes ont été régularisées dont Ibrahima », rapporte le bénévole du Secours catholique. Une déception. Mais lorsqu’il raconte cette histoire, il y a une lueur dans les yeux de Jean-Pierre… « Je me sens dans mon élément », sourit-il.

Rencontrer des personnes aux horizons très différents, c’est ce que recherche Caroline. Elle a huit élèves dans le cours qu’elle donne à France Terre d’asile. Parfois, quelques-uns sont absents. « Ils ont des parcours de vie très lourds », explique-t-elle. Parmi ses élèves, « un réfugié menacé dans son pays en guerre et qui a vu sa femme être assassinée devant ses yeux. Ou une Iranienne qui a vu sa meilleure amie mourir dans une manifestation, et qui ne vit plus que dans ce souvenir. » Difficile de côtoyer ce milieu ? Peut-être, mais Caroline confie faire ce qu’elle aime : « J’adore enseigner, j’aime transmettre un savoir. Et je me suis juste tournée vers ce que j’aime faire. »

Maati Bargach, RFI, le 09/10/2015