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Réponse au gouvernement sur l'accueil des demandeurs d'asile

Publié le : 17/04/2012

France terre d'asile réagit à la réponse du gouvernement faisant suite à l’avis de la Cour nationale consultative des droits de l'homme en date du 15/12/2011. Dans cet avis, la Cour pointait du doigt la situation critique de l'accueil des demandeurs d'asile en France.

Message ministériel : les demandeurs d’asile en procédure prioritaire bénéficient de l’allocation temporaire d’attente (ATA) et d’une place en hébergement d’urgence pendant leur demande d’asile.

• L’accès des demandeurs d’asile en procédure prioritaire à l’ATA est loin d’être effectif pour ne pas dire fictif. La circulaire du 20 novembre 2009 relative à l’ATA n’a toujours pas été modifiée par le ministère et si une instruction interne de Pôle emploi en tire les conséquences, nombre de demandeurs d’asile ne peuvent y accéder faute de document d’identité. En effet, le versement de l’ATA exige l’ouverture d’un compte pour lequel un document d’identité avec photo est ndispensable. La préfecture ne délivrant aucun document officiel avec photo, les demandeurs d’asile en procédure prioritaire rencontrent de grandes difficultés pour ouvrir un compte et donc pour accéder à l’ATA. => France terre a saisi le Ministère en charge de l’Immigration de cette problématique à deux reprises… restées sans réponse jusqu’à ce jour.

• Leur prise en charge en hébergement d’urgence l’est tout autant. Elle dépend des disponibilités. Or, les dispositifs d’hébergement d’urgence pour demandeurs d’asile sont saturés comme les CADA.

• Par ailleurs, la circulaire du 24 mai 2011 limite leur possibilité d’être hébergé jusqu’à la décision de l’Ofpra. IIs sont de cette manière condamnés à l’extrême précarité, pendant plusieurs mois, jusqu’ à la fin de leur demande d’asile. Cela n’est pas sans conséquence sur leur procédure (dépôt du recours et préparation de l’audience CNDA) mais également sur leur état de santé.

Message ministériel : Les demandeurs d’asile en procédure Dublin bénéficient des conditions matérielles d’accueil.

• Le bénéfice d’une prise en charge des demandeurs d’asile en procédure Dublin en dispositif d’accueil d’urgence doit également être relativisé. Selon les régions, ils sont peu ou pas pris en charge. Et la précarité de leur situation administrative peut jouer en leur défaveur.

• D’autre part, lorsqu’ils obtiennent une décision du juge administratif enjoignant le préfet de leur indiquer un hébergement, il arrive qu’après plusieurs mois ses décisions ne soient toujours pas exécutées.

• Enfin, s’ils ont la chance d’être hébergés, cette prise en charge est limitée par la circulaire du 24 mai 2011 au maximum à un mois après la notification de leur décision de remise. Or, en pratique, l’exécution de leur réadmission vers un autre Etat membre peut être largement postérieure à ce délai. Les demandeurs d’asile peuvent donc se retrouver plusieurs jours voire plusieurs semaines à la rue en attendant leur réadmission.

• Il convient par ailleurs de noter que cette incohérence ne tient pas compte de la position du juge des référés du Conseil d’Etat qui considère que les demandeurs d’asile en procédure Dublin ont droit d’être hébergés jusqu’à leur remise effective à l’Etat membre responsable de leur demande d’asile.

Message ministériel : le référentiel des plateformes d’accueil garantit un accompagnement social, administratif et juridique aux demandeurs d’asile.

• Ce référentiel nivèle par le bas les missions des plateformes d’accueil pour demandeurs d’asile, notamment en matière d’accompagnement social, administratif et juridique.

• L’aide à la préparation de l’entretien Ofpra n’est pas prévue. Mais surtout, l’aide au recours CNDA, garantie pourtant essentielle d’accès à un recours effectif, a tout bonnement été supprimée par le référentiel. Or il convient de préciser que l’aide juridictionnelle comprend certes l’assistance d’un avocat durant l’audience CNDA, mais pas d’aide à la rédaction du recours.

• Par ailleurs, les financements qui ont été attribués aux plateformes d’accueil pour 2012 ne permettent pas d’assurer l’intégralité des missions définies par le référentiel. L’accompagnement, même minimal, ne pourra donc être garanti et l’objectif d’homogénéisation des prestations entre les plateformes d’accueil n’est pas atteint.

Message ministériel : Hausse de la demande d’asile de 60 % depuis 2007 :

• L’année de référence prise par le ministère en termes de niveau de la demande d’asile est l’année 2007… soit l’année où la demande d’asile a été la plus basse de toute la décennie. En partant de ce niveau particulièrement bas, il était logique que la demande d’asile retrouve progressivement  son niveau habituel (52 000 demandes en moyenne).

• Sur une période plus significative (10 ans), on constate que le niveau actuel de la demande d’asile n’a rien d’excessif.

Message ministériel : La France est le 1er pays en Europe en matière d’asile et concentre 20% des demandes d’asile de l’Union européenne :

• Si la France est première en matière d’enregistrement de demande d’asile en Europe, c’est seulement en termes absolus. Les déclarations répétées de générosité de la France sont donc à relativiser.

• Afin d’apprécier la « charge » que cela représente pour une société, le nombre de demandeurs d’asile doit être rapporté au poids démographique de chaque pays. Or, proportionnellement, la France est le 9e pays d’accueil des demandeurs d’asile dans l’Union européenne, certes devant l’Allemagne et le Royaume-Uni… mais loin derrière la Suède, la Belgique, Malte, Chypre ou l’Autriche. 

Message ministériel : Cette « hausse exponentielle » est la cause de la saturation du dispositif national d’accueil malgré l’augmentation du budget alloué à la prise en charge des demandeurs d’asile de 62 % de 2008 à 2011.

La saturation du DNA s’explique :

• D’une part par une sous dotation structurelle du parc de places CADA =>  au regard des 52 000 demandeurs d’asile que la France accueille chaque année en moyenne depuis plus de 10 ans, le dispositif national d’accueil qui compte 21 410 places CADA (centres d’accueil pour demandeurs d’asile) apparait largement sous doté.

• D’autre part, par une gestion désastreuse et irresponsable des crédits : en 2011,  279 millions d’euros ont été dépensés pour l’hébergement d’urgence (HUDA) et l’allocation temporaire d’attente (ATA), contre seulement 199 millions d’euros pou les CADA ! Or, une place CADA coûte moins cher que l’HUDA et l’ATA réunis et offre en plus un accompagnement adapté aux demandeurs d’asile.

• Une gestion raisonnée des deniers publics, basée sur la création de places CADA, aurait permis d’offrir un accueil digne à tous les demandeurs d’asile en dépensant moins.

Message ministériel : Le référentiel coût des CADA permet de répartir les crédits alloués aux CADA de manière plus objective. 

Au contraire, pour 2012, la répartition de l’enveloppe nationale entre les régions est tout simplement ahurissante : l’Ile-de-France, première région en matière d’asile, concentrant à elle seule 42,5% des demandes, voit sa dotation amputée de plus de 4 % malgré des charges plus importantes que partout ailleurs. Les dotations varient dans un même secteur, mais également selon les acteurs, sans que l’on en saisisse les raisons.

Message ministériel : Le gouvernement français, dans un contexte de hausse, a fait le choix de maintenir l’ensemble des garanties qui entourent le droit d’asile et l’augmentation de la part de demandes d’asile examinées en procédure prioritaire n’est que le fruit d’une augmentation de la demande d’asile « infondée ».

L’examen en France des demandes d’asile sous l’angle de la procédure prioritaire comprend plusieurs carences juridictionnelles comme en témoigne la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme  dans l’arrêt IM c/France du 2 février 2012. Mais le ministère feint de l’ignorer en en limitant la portée.

Si le recours à la procédure prioritaire est en augmentation, c’est parce que le champ d’application de cette procédure d’exception est constamment élargi par les pouvoirs publics :

• Elargissement continue de la liste des pays d’origine sûrs
• Extension des cas de placement en procédure prioritaire
• Application de la procédure prioritaire fortement encouragée par le Ministère

Cet élargissement abusif des procédures d’exception a été maintes fois sanctionné par le Conseil d’Etat, comme en témoigne le récent camouflet infligé à l’Ofpra par les Sages qui ont retiré l’Albanie et le Kosovo de la liste des pays d’origine sûrs (CE 26/03/2012).

Pour lire l'avis de la CNCDH sur l'accueil des demandeurs d'asile en France, cliquez ici  

Pour lire  la réponse du gouvernement à l'avis de la CNCDH sur l'accueil des demandeurs d'asile en France, cliquez ici