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« Je ne veux plus vivre illégalement »

Publié le : 13/01/2014

L’histoire de Hagop, turque de 29 ans vivant en Belgique

«  Je ne veux plus vivre illégalement, j’en ai assez. Je veux juste rentrer en Turquie. Me libérer ? Oubliez ça. Je ne veux pas partir, soit vous me renvoyez en Turquie soit vous résolvez mes problèmes. »

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Hagop est arrivé en Belgique quand il était encore adolescent avec sa mère et sa sœur après que son père se soit fait assassiné. En Belgique, toute la famille demanda l’asile. Le tribunal saisi alors rendit sa décision 13 ans plus tard, après que la mère de Hagop soit décédée. Entre temps, d’autres procédures de régularisation ont été lancées, et sont encore en cours. Hagop veux retourner en Turquie parce que vivre en marge de la société sans aucune stabilité, on ne peut pas appeler ça une vie. Il a été placé en rétention administrative deux fois, mais rentrer est impossible parce que les autorités turques ne trouvent aucune trace de lui dans leurs registres. Hagop a maintenant 29 ans et nulle part où aller. Il n’a toujours aucun document, aucun logement et aucun futur.

À la recherche d’un endroit sûr

J’appartiens à la minorité arménienne qui vit en Turquie. Quand mon père s’est fait assassiné, ma mère a décidé de nous emmener ma sœur et moi en Belgique. Nous sommes arrivés en 1998 ; j’avais 13 ans à l’époque. On a demandé l’asile immédiatement, mais trois ans plus tard notre demande a été rejetée. Je ne sais rien à propos de l’entretien que ma mère a donné.  Je n’ai aucune information ; tout ce que je connais c’est le nom du village. Malgré notre situation, nous avons essayé de nous construire une vie normale. Je suis allé à l’école et ai même commencé un stage, mais je n’ai pas pu le finir parce qu’on avait perdu nos papiers.
En 2002, j’ai également demandé une régularisation pour raisons humanitaires. Jusqu’à aujourd’hui je n’ai toujours reçu aucune réponse, positive ou négative.
Quand ma mère est morte en 2008, les vrais problèmes ont commencé. La maison était trop grande pour moi et je ne pouvais pas me permettre de payer le loyer. J’ai regardé pour d’autres appartements mais la commune n’a jamais voulu enregistré mes demandes, j’ai donc dû vivre à la rue, ce qui est encore le cas aujourd’hui. J’ai dormi dans des refuges pour sans-abri ou dehors dans le froid et je n’avais pas d’autres choix que de voler pour survivre. J’ai finalement eu des ennuis avec la loi et ai fini en prison.

La cruauté du système

La première fois que j’ai fini en rétention fut après un séjour en prison. Au lieu de me relâcher, j’ai été enfermé six mois supplémentaires en  rétention administrative. C’était vraiment injuste. Six mois supplémentaires de prison, parce que ils ne pouvaient pas me renvoyer dans mon pays !

Les autorités ont essayé de me renvoyer en Turquie mais cela s’est avéré impossible. Ils m’ont dit que la Turquie ne voulait pas de moi et que je n’avais aucun intérêt à y revenir car ils ne me procureraient pas de documents de voyage. Quand ils m’ont finalement relâché, ils m’ont ordonné de quitter la Belgique sur le champ.
Je suis allé jusqu’en Suède, en espérant qu’ils me délivreraient l’asile. Cela avait bien commencé ; j’avais une vie sociale et même une copine. Pourtant, deux ans plus tard j’ai été arrêté et renvoyé en Belgique – et pour ne rien arranger, la Belgique m’a ensuite ordonné de quitter le pays à nouveau ! J’étais censé aller où ? Je ne comprends pas pourquoi la Belgique m’a fait revenir. Je voulais me suicider… Comment pouvaient-ils me traiter de la sorte ? J’ai tout perdu. [Il nous montre ses bras mutilés rempli de cicatrices]
Je suis malade et fatigué de vivre. J’ai même essayé de retourner en Turquie volontairement, mais à nouveau, la réponse fut négative, la Turquie ne me reconnait pas comme l’un de ses citoyens. Apparemment, ils ne trouvent aucune trace de mon nom dans leurs registres. Tout vaut mieux que cette vie. Je serais heureux d’aller vivre n’importe où ailleurs, dans n’importe quel pays qui m’accepte – même en Somalie !

Quand la détention et meilleure que la liberté

En Janvier 2013, j’ai été arrêté et envoyé en centre de rétention. Après un mois j’ai été à nouveau relâché, mais je ne voulais pas partir. La vie était bien là-bas… j’avais un toit au dessus de la tête, j’avais mon MP3 et je m’occupais de mes affaires. Je vivais comme un roi. Je ne voulais pas partir avant qu’ils me renvoient dans mon pays ou qu’ils résolvent mon problème. Ils ont dû appeler la police pour me jeter hors du centre de rétention – Vous vous rendez compte ?
Je veux juste une vie normale. Je veux trouver un travail, un travail déclaré. Je veux avancer dans la vie. Pensez vous que j’aime être un criminel ? Je suis fatigué de tout ça. Je veux faire quelque chose de bien, fonder une famille… avoir un chat. Les belges adore les chats pas vrai ?


1998: Assassinat du père. La famille s’échappe en Belgique.
2001: La demande d’asile est rejetée.
2002: Demande de régularisation.
2008: Mort de la mère. Hagop devient sans-abri.
2009: Hagop demande l’asile et reste dans un centre semi-fermé. Demande d’asile rejetée, il redevient sans-abri.
2010: En prison avant le procès, suivi par 6 mois de rétention administrative. Demande de régularisation rejetée. Quitte la Belgique pour la Suède.
2011: Rejet définitif de la première demande d’asile.
2012: Renvoi de Suède vers la Belgique. Retour volontaire en Turquie rejeté.
2013: Arrêté et placé dans un centre de rétention, Relâché un mois plus tard car non éloignable. Recours contre le rejet de régularisation toujours en attente.

16 en Belgique
Toujours sans papiers et non éloignable pour des raisons administratives.

 

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