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A la Chapelle, les bénévoles inquiets du sort des réfugiés cet été

Publié le : 06/07/2017

liberation


Collectifs et associations s'activent devant la non-prise en charge des migrants qui affluent dans ce quartier parisien. Plus d'un millier vivent à la rue à proximité d'un centre de premier accueil totalement débordé.

 

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Paris, le 23 juin 2017. Migrants porte de la Chapelle devant le centre humanitaire. Photo Albert Facelly pour Libération

 

A la porte de la Chapelle, dans le nord de Paris, la situation n’est plus tenable. Pour les réfugiés installés aux abords du centre humanitaire totalement saturé, comme pour les bénévoles qui leur viennent en aide. Depuis le début du mois de juin, les associations et collectifs présents sur place alertent l’Etat et la mairie de Paris sur les conditions sanitaires dans lesquelles vivent près de 1 200 migrants sans-abri, le centre ne pouvant recevoir que quatre cents personnes. Or «une centaine de nouveaux primo-arrivants s’installent chaque jour» explique Clarisse Bouthier, du collectif Solidarité Wilson. En conséquence, le nombre de sans-abri dormant à même le sol ou sous des abris de fortune ne cesse chaque jour d’augmenter. «Avec les bénévoles, on est sur les rotules» souligne Clarisse Bouthier. Yann Manzi, le vice-président d’Utopia 56, dénonce aussi le «déni du gouvernement» : «Tous les gens à la rue sont pris en charge par des citoyens, alors que c’est à l’Etat de s’en occuper !»

Le système solidaire improvisé par des centaines de volontaires du quartier depuis novembre dernier fonctionne tant bien que mal. Mais depuis que le centre est totalement débordé par les arrivées en continu, tout ce petit monde peine à joindre les deux bouts. Mardi, le conseil de Paris dirigé par Anne Hidalgo a de nouveau tiré la sonnette d’alarme auprès de l’Etat, plaidant pour la «mise à l’abri» de ces réfugiés et l’ouverture de nouveaux établissements, notamment dans les «métropoles situées sur les routes migratoires».


Limite atteinte

 

En attendant des réponses concrètes, les volontaires de la Chapelle sont sur le qui-vive. Chaque jour, en plus de leurs boulots, ils distribuent le minimum vital : couvertures, sacs de couchage, eau. «Il n’y a que trois sanitaires pour 1 200 personnes !» constate Yann Manzi, «c’est comme si l’Etat ne voulait pas voir. On ne met pas de toilettes, comme pour dissuader les gens de se fixer près du centre.» Le collectif Solidarité Wilson offre, lui, un petit-déjeuner chaque matin. Les approvisionnements sont stockés chez les volontaires, déchargés aux aurores, puis remballés vers l’heure du déjeuner. «C’est une organisation de dingue» explique encore Clarisse Bouthier, pour qui la dernière distribution a duré près de dix heures. Face à l’afflux de nouveaux réfugiés à l’approche de l’été, la permanence des bénévoles atteint sa limite : «Hier, j’avais neuf cents gobelets. J’ai dû aller en acheter d’autres. Pareil pour le petit-déjeuner, j’ai fait trois allers-retours au supermarché. Le tout de notre poche.» Une cagnotte en ligne a été mise en place par le collectif, qui demande depuis des mois à la mairie un local pour stocker la nourriture et l’eau.

Pour tous, l’arrivée des congés d’été est une vraie préoccupation. «Pendant les vacances, nos effectifs vont beaucoup diminuer, alors que les réfugiés seront de plus en plus nombreux» s’inquiète Clarisse Bouthier. Pierre Henry, le directeur de France terre d’asile s’alarme aussi de voir la porte de la Chapelle devenir «un gigantesque entonnoir» pendant la période estivale, si aucun dispositif durable n’est créé. «On ne demande pas au gouvernement de financer l’extérieur du centre» explique le directeur, «mais on sait que l’Ile-de-France accueille 50 % des primo-arrivants, il faut absolument de nouvelles structures réparties sur l’ensemble du territoire.»

Epuisés et agacés, les bénévoles attendent les solutions promises par le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, qui devrait dévoiler un «plan» sur l’asile dans les prochains jours. Sans quoi, l’été à la Chapelle se passera, selon Pierre Henry, «avec plus de sécurité [l’emploi de la force pour déloger les réfugiés, ndlr]». Et moins d’humanitaire.

 

Par Libération, le 05/07/2017