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Calais : la fermeté de Gérard Collomb inquiète les associations

Publié le : 26/06/2017

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Ce vendredi, pour la première fois depuis qu’il est entré en fonction, le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb s’est rendu à Calais « pour constater sur place la situation ». Huit mois après le démantèlement de la Jungle, il affirme qu’aucun autre centre ne sera construit.

 


Mercredi, quatre migrants ont été mis en examen et écroués. Ils sont soupçonnés d’être à l’origine d’un barrage sur l’autoroute ayant causé la mort du chauffeur d’une camionnette dans la nuit de lundi à mardi, près de Calais. « Je ne viens pas parce qu’il y a eu un drame. Je voulais constater sur place la situation », a assuré Gérard Collomb au quotidien Nord Littoral, la veille de sa venue.

Renforcer la sécurité grâce à la mobilisation de 140 policiers ou gendarmes mobiles et investir 5 millions d’euros pour étendre l’éclairage sur l’autoroute A16 sont pourtant les premières mesures qu’il a annoncées, avant d’affirmer sans détours « qu’il n’y aura pas de centre à Calais ». Une « fermeté » assumée, qui tranche avec celle de ses prédécesseurs.


« Un sentiment de frustration »


« Si l’A16 bénéficie de plus de lumière c’est très bien, mais il y a aussi des besoins pour l’accueil des demandeurs d’asile sur l’ensemble du territoire », rappelle Pierre Henry, à la tête de France terre d’asile. Avec d’autres représentants d’associations présentes à Calais, ils ont pu échanger avec le ministre de l’Intérieur en fin de matinée. « Une réunion qui débouche sur un sentiment de frustration », confie M. Henry. Les propositions de Gérard Collomb se bornent à la « mise en place d’un plan national dont nous ne connaissons pas les contours ».

Peu après son arrivée sur le port de Calais, le ministre avait en effet indiqué qu’il allait présenter « dans les quinze jours » un « plan » au Président pour « traiter le problème de l’asile de manière plus facile qu’aujourd’hui ». « Le droit d’asile est un droit fondamental, il doit être respecté », avait-il affirmé à Nord Littoral, se rangeant ainsi derrière la position du chef de l’État qui a fait de la réforme de la procédure de demande d’asile une priorité.


« Garantir le respect des droits fondamentaux »


Les associations voient l’urgence ailleurs. Vendredi dernier, dix d’entre elles (dont l’Auberge des migrants, le Secours catholique et la Cimade) ont saisi le tribunal administratif de Lille. Elles attaquent la préfecture, le département du Nord, la communauté de communes du Grand Calais et la mairie de Calais, à qui elles demandent de « garantir le respect des droits fondamentaux de base » des migrants. L’audience s’est tenue mercredi et la présidente du tribunal a mis sa décision en délibéré à lundi « au plus tôt ».

Pierre Henry regrette qu’aucune réponse n’ait été donnée par le ministre de l’Intérieur sur cette question de la garantie des droits fondamentaux. Même sentiment du côté de l’Auberge des migrants :

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Parmi ces droits, celui d’être logé. Aujourd’hui, le directeur général de France terre d’asile estime entre 600 et 700 le nombre de migrants dans le Calaisis qui « doivent être orientés dans des structures adaptées ». « 1000 à Paris » ajoute-t-il avant de dérouler une série de chiffres sur l’ensemble du territoire.


« Des centres saturés » et la distribution de repas « limitée »

 

« Nous n’installerons aucune structure à Calais », martèle le ministre de l’Intérieur depuis hier. Et d’ajouter « Plus de 10 00 places ont été ouvertes depuis 2015 (…) Nous ouvrons à travers la France un certain nombre de centres ». Des centres « saturés » selon Pierre Henry. « S’il y a des places vacantes alors il faut remplir. »

Outre un toit, c’est de la nourriture qui manque aux migrants.  La préfecture du Pas-de-Calais a décidé de « limiter dans l’espace et dans le temps » la distribution de repas « pour ne pas conduire à la réapparition de points de fixation ».

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Éviter un « appel d’air »

Un vocabulaire déshumanisé similaire à celui employé par le ministre de l’Intérieur, qui ne veut pas laisser « s’enkyster progressivement un certain nombre de gens qui arriveraient ici ». D’où sa volonté de renforcer les forces mobiles, et celle, ferme, de ne pas réinstaller un centre à Calais pour éviter un « appel d’air ».

Finalement, l’exécutif est plus enclin à renforcer le « contrôle aux frontières » de l’Union européenne et à mettre en place « une vraie politique d’asile » coordonnée au niveau européen, comme l’a rappelé Emmanuel Macron lors de sa conférence de presse commune avec Angela Merkel, à l’issue de son premier Conseil européen. « Calais n’est pas abandonnée par les pouvoirs publics », affirme pourtant Gérard Collomb avant de faire part de ses deux priorités : « Neutraliser les réseaux de passeurs » et « accompagner les hommes et les femmes qui obtiennent l’asile ».

 

« La réalité du terrain va prendre le pas »

« Nous sommes dans un début de quinquennat, il faut que les choses s’apprennent, ça peut prendre du temps. Mais à un moment ou un autre la réalité du terrain va prendre le pas sur les approximations », conclut Pierre Henry. L’Auberge du Migrants est, quant à elle, un peu désabusée. L’association n’espérait rien de cette réunion, mais en est tout de même sorti déçue.

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Au-delà de la déception, c’est l’indignation qui prévaut. Politiques, associations et citoyens ont été choqués par les propos de Gérard Collomb.

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Lors de sa conférence de presse à Bruxelles, avec Angela Merkel, Emmanuel Macron a tenu à rappeler les valeurs de la France quant à l’accueil des réfugiés.

Par Public Sénat, le 23/06/2017