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L'Angleterre n'est plus l'eldorado, les migrants en rêvent encore

Au nord de la France, des milliers de clandestins continuent d'espérer un sésame pour la Grande-Bretagne.

 

D'autres, qui ont réussi le passage, sont déçus par leur nouvelle existence. « L'eldorado anglais » perdrait-il de son attractivité ?
De la déception, voire des illusions perdues. C'est que ressentirait la population immigrée non-européenne au Royaume-Uni en ce moment. S'ils restent nombreux, les nouveaux migrants seraient moins nombreux à gagner les côtes de la Manche. Certains spécialistes, en s'appuyant sur les précédentes crises financières, parlent même prudemment d » « année retour ».


Depuis 2007, le marasme économique n'a en effet pas épargné les secteurs professionnels où les travailleurs immigrés sont nombreux en Grande-Bretagne, notamment le bâtiment.


« Une forte compétition avec les ressortissants d'Europe de l'Est »


Mais avant la crise, l'élargissement de l'Union européenne vers les anciens pays du bloc soviétique avait déjà changé la donne. Virginie Guiraudon, chargée de recherche au CNRS sur les politiques d'immigration, explique :
« Il y a une très forte compétition avec les ressortissants des huit pays d'Europe centrale et orientale entrés dans l'Union en 2004. Ils bénéficient d'un meilleur accès au marché du travail et surtout d'une possibilité d'aller et venir à leur guise entre chez eux et le Royaume-Uni. »


La majorité des clandestins choisit cependant la Grande Bretagne davantage pour sa langue que pour sa courbe de croissance. On ne peut alors parler, selon Virginie Guiraudon, que d'effet indirect :
« La crise touche avant tout les contacts et la communauté sur place qui ne vont plus être en mesure d'accueillir aussi facilement les arrivants. La population intégrée depuis longtemps a la possibilité de rester, mais ce sera différent pour les nouveaux arrivants. »
La forte hausse du taux de chômage en Grande-Bretagne, passé de moins de 2,8% de la population active fion 2008 à plus de 4,7% cet automne, a donc des conséquences sur les flux migratoires.


Un mirage entretenu par le manque d'informations des migrants


Les candidats à la traversée vers l'Angleterre pâtissent également d'informations quelque peu erronées. Notamment en ce qui concerne les demandes d'asile, comme le relève Pierre Henry, directeur général de France terre d'asile : « Il existe une survalorisation de cette destination, alors je ne vois pas de raisons de favoriser l'Angleterre par rapport à la France. »


Les associations travaillent donc à informer les candidats à l'exil des réalités de l'eldorado britannique. A l'instar de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) depuis 2006, ou encore du Haut commissariat aux réfugiés (HCR) qui, depuis son bureau calaisien, tente d'« apporter une information fiable et objective sur la demande d'asile en France ».


Insuffisant pour tarir le flux de de réfugiés sur les côtes de la Manche, même après la fermeture de la « jungle » décidée par Eric Besson, ministre de l'Immigration, le 22 septembre : le rêve britannique reste bien vivant.


Les services de police confient cependant à demi-mot, et de façon non-officielle, l'apparition d'un phénomène certes « assez rare » : celui de réfugiés, qui ont souvent mis des mois à atteindre illégalement l'Angleterre tant espérée, et qui finissent par se résigner à rentrer dans leur pays d'origine.


Un retour contraint, au risque, selon la législation en vigueur, d'être renvoyé dans le dernier pays receveur de la demande d'asile. A savoir l'Angleterre… Pour éviter d'en arriver là, l'Union européenne examine à l'heure actuelle la possibilité d'organiser des charters communs entre les pays membres pour renvoyer les immigrés illégaux. Déçus ou non.


Par Mathieu Olivier,
Rue89, le 7 novembre 2009