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cp/Sommet de Copenhague: les réfugiés climatiques

Sommet de Copenhague

Réfugiés climatiques, une commodité de langage ?

Les chefs d'Etat et diplomates de près de 200 Etats se réunissent aujourd'hui à Copenhague pour trouver un accord politique et financier efficace afin de lutter contre le réchauffement climatique.

L'ambition des objectifs est à la hauteur des efforts demandés aux responsables politiques. Selon la Banque mondiale, les pays industrialisés subiront les conséquences du réchauffement climatique à hauteur de 2% alors que 98% des 325 millions de personnes victimes de ses conséquences directes se trouvent dans les pays en développement. Les difficultés se trouvent bien encore et toujours dans les pays pauvres.

Selon les experts, entre 150 millions et 1 milliard de personnes seraient poussées à se déplacer d'ici 2050 en raison de possibles catastrophes naturelles liées au réchauffement climatique. Parler de « réfugiés climatiques » aujourd'hui paraît une commodité de langage. Malgré toutes les projections et estimations, il est difficile de définir aujourd'hui quel sera le lien immédiat ou indirect entre les effets du réchauffement climatique et les mouvements de population dans l'avenir. Les déplacements seront dans un premier temps des déplacements internes, voire régionaux, ayant pour effet l'augmentation de la pression aux abords des mégalopoles du Sud et perturbant l'accès aux ressources et infrastructures de base. Le risque potentiel de voir des tensions accrues dans les pays pauvres est réel.

Les caractéristiques de ces déplacements justifient-elles, à elles seules, la création d'une nouvelle catégorie de « réfugiés climatiques », que ce soit à travers la signature d'un protocole à la Convention de Genève de 1951 ou par la remise à plat de ce texte ? La dernière option paraît risquée compte tenu de l'incertitude sur l'aboutissement qu'une telle négociation aurait au jour présent. Voir les Etats réduire les ambitions de ce texte est un risque majeur.

Bien qu'il soit encore difficile d'envisager un lien immédiat entre l'intensité accrue des catastrophes naturelles, la hausse du niveau des mers, la raréfaction des ressources d'eau potable et la migration forcée, il n'est pas moins évident que ces phénomènes sont à l'origine d'une menace croissante à la stabilité des pays du Sud.

Ce sont précisément les risques humains liés aux conséquences du réchauffement climatique et la prévention des conflits potentiels qui sont en jeu à Copenhague ces deux semaines. Et ceci est peut-être plus difficile encore que la réduction des gaz à effet de serre.

cp/France terre d'asile, Paris, le 7/12/2009


L'indifférence face aux victimes

Les rapports prévisionnels s'accumulent... Mais depuis vingt ans, rien n'est fait pour se préparer à l'exode forcé de plusieurs millions de personnes, déplacées à cause de la montée des eaux, de l'avancée des déserts ou encore de la salinisation des sols. A Copenhague, les dirigeants vont devoir se pencher sur le sort des "réfugiés climatiques".

Seront-ils 100, 200 millions...voire même un milliard d'ici 2050? Parler des réfugiés climatiques, c'est avant tout faire face à une guerre des chiffres. Experts, scientifiques, politiques, conseillers d'Etat : depuis quelques années, ils se réunissent, discutent... sans rien décider. Une certitude : dans quelques décennies, le monde sera confronté à une « marée humaine » formée par les millions de personnes forcées de quitter leur lieu de vie.
Pour chaque centimètre de hausse du niveau des océans, il y aura un million de déplacés dans le monde, prévoient les spécialistes. Soit 6 millions d'individus condamnés à fuir chaque année à cause du dérèglement climatique, estime L. Craig Johnstone, haut commissaire de l'ONU pour les réfugiés.

Querelle de chercheurs

Difficile d'établir précisément les liens entre la dégradation de l'environnement et les situations vécues. Certains experts refusent même de considérer les victimes de catastrophes naturelles comme des réfugiés climatiques. Patrick Allard, chercheur et conseiller pour le Quai d'Orsay, estime par exemple que les victimes du tsunami survenu en décembre 2006 n'en font pas partie. Mais pour François Gemenne (voir interview), chercheur à l'IDDRI, ces personnes déplacées sont bien des réfugiés, tout comme, d'ailleurs, les victimes du cyclone Katrina.
A l'origine de ces divergences : les situations à la fois complexes et différentes que recouvre le terme « réfugié climatique ». Certaines populations vont être déplacées, comme en Chine, où le désert de Gobi mange peu à peu des terres, progressant jusqu'à Pékin, qui subit chaque année les rafales des tempêtes de sable. Au Bangladesh, la salinisation des sols, due aux inondations, met en péril la survie de la population. D'autres auront les moyens de s'adapter, à l'image de la Norvège, qui envisage de construire des maisons flottantes (lire notre encadré). Enfin, des pays comme Tuvalu vont disparaître, engloutis sous les eaux (lire notre article). Il y a donc urgence.

Face à la « crise globale », aucune action

La catastrophe est annoncée depuis longtemps. En 1985, un rapport des Nations Unies évoque ces victimes des dégradations du climat et pose la question du statut de réfugié environnemental. Mais la communauté internationale a encore du mal à prendre position sur un phénomène «perçu comme venant aggraver les problèmes de ce monde », analyse Patrick Allard.
Jean-Pierre Alaux, chargé d'études au GISTI, organisation de défense des droits des immigrés, s'énerve : « On agira encore trop tard, quand la situation sera devenue intenable. Comme d'habitude, l'Etat va improviser et s'incliner devant la réalité d'une errance qu'on aurait pu traiter plus tôt et dont on s'occupera dans l'urgence. »

Car la communauté internationale se réveille...doucement. En mars 2008, Javier Solana, haut-commissaire européen aux refugiés, publie un rapport dans lequel il précise la manière dont les pays riches devraient se préparer à l'arrivée de ces réfugiés climatiques. Une philosophie plus « protectionniste que protectrice » déplore Jean-Pierre Alaux. Et pour cause : les Etats, déjà frileux à l'idée d'accueillir des réfugiés politiques, voient d'un mauvais œil l'arrivée de ces victimes du climat. A l'image de la France qui, malgré l'urgence, n' a pris aucune position sur la question.
Pour la députée belge Juliette Boulet, c'est donc la communauté internationale qui doit agir face à ce qu'elle qualifie de « crise globale », définie comme « une crise climatique, mais aussi énergique et alimentaire ». Pour « passer de la parole aux actes », cette écologiste plaide notamment pour la désignation d'un représentant spécial aux Nations Unies. Mais pour l'instant, aucun cadre juridique, aucune loi internationale ne définit le statut des réfugiés climatiques. « C'est au bon vouloir de chacun », soupire François Gemenne.

Un statut juridique, première étape vers la reconnaissance

Certains envisagent d'étendre aux réfugiés climatiques les droits définis par la convention de Genève de 1951 sur les réfugiés et apatrides. Trop risqué, pour Pierre Henry, directeur général de France Terre d'Asile : « Si on remet ce texte en négociation, les Etats pourraient alors être tentés de lui donner un sens restrictif, moins protecteur ».
Bettina Laville, conseillère d'Etat spécialiste de l'environnement, est favorable à ce statut, qui constitue une première étape vers la reconnaissance.
Pourtant, les Etats restent réticents à l'idée d'accorder ce droit. Les problèmes climatiques, politiques ou économiques étant souvent mêlés, les populations à qui ils refuseront le statut de réfugié politique pourraient alors percer la forteresse Europe en obtenant celui de réfugié climatique. Une gestion des frontières sécuritaire, une réticence à accueillir les futurs réfugiés...
Autant de craintes injustifiées pour Patrick Allard. « Il est faux de croire que seuls les Etats du Nord seront soumis à un déferlement de réfugiés. En réalité, les principaux états d'accueil seront les Etats du Sud, à proximité des zones géographiques touchées par les bouleversements climatiques. » Des Etats périphériques qui risquent, au final, d'accueillir les populations déplacées dans l'urgence et sans préparation. Pour les aider, Bettina Laville préconise la création de forces spéciales gouvernementales, sortes de « casques verts ».

Un fonds... sans argent

Au vu de la lenteur des négociations internationales sur la création d'un statut, des humanitaires plaident, à l'image de WWF, pour la création d'un fonds international destiné à indemniser les victimes du réchauffement de la planète.
Si les Etats rechignent à mettre la main au portefeuille, ils pourraient payer bien plus cher les conséquences de leur inaction. En effet, le dérèglement du climat risque de générer de nouveaux conflits, pour l'accès à l'eau notamment. Ce qui ajouterait à la détresse des réfugiés climatiques le traumatisme des guerres dans lesquelles les Etats occidentaux seraient obligés, au final, d'intervenir.

par Elodie Vialle, le 06/12/2009

Youphil


Le casse-tête du statut des futurs réfugiés climatiques

En octobre dernier, le gouvernement des Maldives a effectué un conseil des ministres sous l'eau, afin de sensibiliser la communauté internationale au réchauffement climatique : L'archipel risque de disparaître sous le niveau de la mer dans moins de 100 ans.
Les populations obligées de fuir leurs habitations à cause des conséquences du changement climatique n'ont aucun statut juridique au regard du droit international. Or le problème va aller grandissant.

Un État entier qui disparaît sous les eaux. C'est ce qui risque d'arriver aux Maldives dans une centaine d'années, si le niveau de la mer continue de s'élever à cause du réchauffement climatique. Leurs îles rayées de la carte, les 400.000 habitants seraient alors obligés de s'installer dans un autre pays. Cet événement sans précédent dans l'histoire de l'humanité poserait une question : quel statut donner à ces futurs déplacés ?

Selon un rapport de l'ONU, 20 millions de personnes ont fui en 2008 leurs lieux d'habitation suite à des catastrophes climatiques liées au réchauffement de la planète. Environ 80% d'entre elles se sont déplacées à l'intérieur de leur propre pays, comme au Bangladesh, «où les populations du sud fuient les tempêtes et les inondations vers le nord, et affluent dans des bidonvilles, sans aucune aide» explique François Gemenne *, spécialiste des migrations environnementales. D'autres, quelque 20%, se sont déplacées en dehors de leur propre pays. C'est le cas des habitants du Nicaragua et du Honduras qui ont fui le cyclone Mitch en 1998 en s'installant illégalement aux Etats-Unis. C'est le cas aussi en Afrique, où des populations qui fuient la sécheresse s'installent dans un pays voisin ou émigrent , le plus souvent clandestinement,en Europe.

Or le problème va aller grandissant. En 2050, le nombre de personnes forcées de se déplacer devrait être de l'ordre de 200 ou 250 millions, selon les estimations de l'office international des migrations (OIM). Seraient concernées les populations fuyant l'avancée du désert de Gobi en Chine, les inondations dans le delta du Bangladesh, le delta du Nil, ou encore la submersion de certains archipels. «Ces chiffres sont à prendre avec précaution», nuance toutefois François Gemenne. Il est quasiment impossible pour l'instant de faire des estimations précises.» Les conséquences du réchauffement climatiques sur la planète sont déjà difficiles à connaître précisément, il est donc encore plus délicat d'en prévoir précisemment des conséquences migratoires.

Quel que soit le nombre, le problème est déjà là : jusque ici, ces migrants environnementaux n'entrent dans aucune «case» du droit international. La Convention de Genève de 1951 définit précisément le concept de réfugié, comme étant «une personne victime de persécution», ou voulant «fuir une zone de guerre», explique Jean François Durieux, responsable du changement climatique au Haut-commissariat des Nations-Unis pour les réfugiés (HCR). Les déplacés climatiques n'entrent donc pas dans cette définition. Or, le statut de réfugié permet d'obtenir certains droits, comme la garantie de ne pas être renvoyé dans le pays où sa vie peut être menacée, le droit au travail, au logement. «Autant de garanties auxquels les réfugiés climatiques ne peuvent pas prétendre», explique Christel Cournil **, chercheuse à l'Iris, spécialiste du statut des réfugiés.

3000 Tuvaluens ont fui leur île

Si la notion de réfugié climatique est complexe à délimiter - d'autres facteurs , économiques notamment pouvant venir se rajouter - les agences internationales ont bien conscience des problèmes que pose ce vide juridique. Or, «jusqu'ici, les États rechignent à réfléchir au sort des déplacés climatiques», déplore Jean-François Durieux. Conscients des coûts et des problèmes que cela posera, les États ont peur d'être obligés d'accueillir davantage de migrants. «Tout ce qui touche aux migrations internationales est actuellement tabou» constate-t-il.

Quelques pistes sont déjà envisagées par les chercheurs et les ONG. La définition du réfugié inscrite dans la Convention de Genève, pourrait être élargie, afin d'y intégrer des causes climatiques et non plus seulement la notion de persécution. «Le risque est de créer une concurrence avec le réfugié politique, déjà difficile à obtenir» souligne Jean-François Durieux. Une protection spécifique des déplacés climatiques pourrait par ailleurs être créée, indépendante de la Convention de Genève, associée par exemple aux textes de l'Onu sur le climat. Mais, à l'heure où les pays ont du mal à trouver un terrain d'entente pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, il semble pour l'instant difficile de trouver un consensus sur la question.

La piste «la plus réaliste», selon Jean-François Durieux, serait des conventions d'Etat à Etat, «sur le modèle de ce qui est déjà mis en place entre les îles Tuvalu, menacées par la montée des eaux, et la Nouvelle-Zélande». Il ne s'agit pas encore d'accords de migration environnementale, mais de migration économique : ils permettent aux Tuvaluens de partir travailler en Nouvelle-Zélande. De fait, plus de 3000 Tuvaluens sur les 11 000 habitants de l'archipel ont déjà émmigré en Nouvelle-Zélande, par peur d'être enseveli sous les eaux.

par Laure Daussy, le 01/12/2009

Le Figaro


Copenhague : le dossier de préparation de Terra Nova

Découvrez l'excellent dossier réalisé par terra nova sur le sommet de copenhague

Le sommet sur le changement climatique, qui s'ouvre le 7 décembre à Copenhague, est un moment important pour notre avenir collectif. L'enjeu est simple : saurons-nous endiguer le réchauffement climatique, et pour cela réduire nos émissions de gaz à effet de serre ? Mais les négociations sont complexes. Terra Nova vous en propose le décryptage.

Le 9 novembre dernier, Terra Nova organisait, au Sénat, un séminaire de préparation au sommet de Copenhague. Une cinquantaine de personnes ont participé à ces échanges : chercheurs, représentants d'associations et responsables politiques ont pu débattre sur les enjeux du sommet.Ce dossier est composé en deux parties :

- Un volet de présentation des enjeux de Copenhague

Ce dossier a été préparé avec Pierre Radanne, président de 4D et membre du conseil scientifique de Terra Nova. Il comprend une note de synthèse politique et une étude détaillée.

- Un volet sur la position des acteurs.

De très nombreux efforts et initiatives ont été réalisés par les différents acteurs de la communauté environnementale, afin de préparer au mieux Copenhague. Nous avons essayé d'en rendre compte en rassemblant les contributions des principales ONG, centres de recherche et organisations politiques. L'objectif est de vous offrir une vision élargie des enjeux, des actions et des positions de l'ensemble des parties prenantes.
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Pour plus d'informations, vous pouvez nous contacter par email à Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser., par téléphone au 01 58 36 15 20 et consulter notre site internet http://www.tnova.fr/