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Les associations négocient leur présence en centres de rétention

Publié le : 03/01/2013

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Les associations candidates pour intervenir dans les centres de rétention administrative pour y assister les migrants ont jusqu’au 10 janvier pour présenter leur dossier. Elles dénoncent certains points de l’appel d’offres lancé par le ministère de l’intérieur et attendent un débat de fond sur le contrôle de l’immigration irrégulière.

Les cinq associations intervenant dans les centres de rétention administrative (CRA) – Cimade, France Terre d’Asile, Ordre de Malte, Forum réfugiés et Assfam – ont gagné une semaine supplémentaire. C’est le 10 janvier au plus tard, et non plus le 3 comme prévu initialement, qu’elles devront remettre leur copie pour répondre à l’appel d’offres lancé par le ministère de l’intérieur.

L’enjeu de ce marché public particulier, couvrant la période du 1er mars au 31 décembre 2013 ? L’assistance juridique et sociale apportée aux étrangers sans titre de séjour enfermés dans l’un des 25 CRA de France, une prestation payée par l’État.

Des dispositions « fortement dissuasives »

Le principe de la mise en concurrence dans ce secteur a été imposé par un décret de 2008, mettant fin au « monopole » de la Cimade. Après avoir combattu devant la justice cette réforme vécue comme une manière de lui faire payer son indépendance, l’organisation protestante avait dû licencier une trentaine de salariés. Le nouveau gouvernement a repris à son compte la notion d’appel d’offres pour les CRA. D’aucuns, dans le milieu associatif, ont aussi estimé que Manuel Valls en reprenait les travers.

Au nom du « devoir de réserve et de l’obligation de discrétion » des intervenants, la première mouture du projet prévoyait en effet des sanctions financières si une association communiquait à l’extérieur sur ce qui se passait dans les centres.

« Mais ce passage a été réécrit, indique Pierre Henry, directeur général de France Terre d’asile. Ce système d’amendes était totalement ahurissant et absurde. » « Il y a eu des modifications importantes, qu’il faut saluer, mais il reste d’autres problèmes », poursuit Lucie Feutrier, chargée du dossier à l’Ordre de Malte. Notamment l’obligation de prévenir les chefs de centre dès qu’une personne assistée par une association dépose un recours. « Cette disposition, fortement dissuasive, est juridiquement inacceptable », juge la Cimade.

Prendre en compte les aspects humains

Cette dernière s’inquiète également de la diminution de l’enveloppe allouée par l’État aux associations, de l’ordre de 4 millions par an pour l’instant, alors qu’il n’est pas prévu de baisse du nombre de personnes placées en centre de rétention (1). De quoi entraîner, selon elle, une dégradation de la qualité du travail effectué. Mais rien n’est encore figé.

« Le prix proposé par l’administration acte des baisses de l’ordre de 20 à 50 % selon les centres, explique Pierre Henry. Évidemment, il va y avoir une sérieuse discussion, d’autant plus que dans certains lieux on nous demande d’être d’avantage présents. »

Lucie Feutrier voit d’ailleurs dans ces fluctuations horaires selon les sites le risque de mettre à mal « l’égalité de traitement » des sans-papiers. Pour elle, les calculs sont de toute façon « un peu biaisés ». « Le ministère s’est appuyé sur des notions plutôt quantitatives, sans tenir compte des aspects qualitatifs et humains, regrette-t-elle. Chaque histoire est différente, on passe parfois beaucoup de temps avec certaines personnes, on ne peut pas faire de moyenne. »

Au-delà de la question des CRA, Pierre Henry attend de la majorité une réflexion plus large. « Qu’est-ce qu’on va faire du système de la rétention ? Quelles alternatives ? Ce débat doit normalement être ouvert l’année prochaine. On verra comment. Mais il est indispensable qu’une loi vienne à terme modifier l’architecture précédente. »

(1) En 2011, 51 000 personnes ont été placées en centre de rétention.

La Croix, le 02/01/2013