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Garantir l'hébergement des jeunes étrangers non accompagnés

Publié le : 07/12/2022

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© Sonia Kerlidou

Le 2 décembre, des jeunes vivant à la rue ont planté leurs tentes devant le Conseil d’Etat. En attente d’une décision du juge quant à l’évaluation de leur minorité depuis plusieurs semaines voire plusieurs mois, ils ne se sont pas vus proposer de solution d’hébergement. Si une mise à l’abri a été effectuée le 7 décembre, il convient d’apporter des solutions durables à une situation amenée à se répéter.

Qui sont ces jeunes ? Des jeunes arrivés en France seuls, sans famille. Ils et elles ont souvent connu un parcours migratoire chaotique ou violent. Certains ont fui leurs pays par crainte de la guerre ou de persécutions. D’autres pour chercher un avenir meilleur.

Une fois arrivés en France, s’ils se déclarent mineures, ils doivent alors être immédiatement mis à l’abri, car la France se doit de protéger tous les enfants en danger sur son territoire. Ce sont les départements, responsables de l’Aide Sociale à l’Enfance, qui s’en chargent.

Comme les jeunes arrivent bien souvent sans documents d’identité, leur minorité et leur isolement doivent ensuite être reconnus. Certains départements confient à des associations, comme France terre d’asile, la mission de conduire une évaluation sociale sur laquelle ils s’appuient pour rendre une décision.

Ces méthodes d’évaluation sont parfois critiquées car elles sont imparfaites. Mais l’évaluation sociale reste la moins mauvaise des solutions, préférable à une approche administrative car la détermination de l’âge ne doit pas devenir un outil de politique migratoire.

À Paris, le département fait des efforts très conséquents pour que cette évaluation soit faite dans de bonnes conditions, ce qui est loin d’être la norme : moyens humains pour l’évaluation, présence continue de travailleurs sociaux dans les hébergements, équipe médico-psychologique…

De trop nombreux départements ne respectent pas leurs obligations légales de mise à l’abri systématique ou le cadre de l’évaluation de la minorité et de l’isolement pour protéger ces enfants. Cela crée des situations d’inégalités très fortes d’un territoire à l’autre.

L’immense difficulté, et la grande faillite du système, provient de l’incapacité collective à prendre en charge correctement celles et ceux qui ne sont ensuite pas reconnus mineurs. Car si des solutions peuvent être trouvées pour les plus vulnérables, la grande majorité finit à la rue.

Pourquoi ? Car dès lors qu’ils ne sont pas reconnus mineurs, ils ne bénéficient plus de la protection de l’Aide sociale à l’enfance (ASE). C’est donc à l’État de prendre le relais, mais comme ces jeunes continuent à se dire mineurs, ils sont souvent refusés des hébergements d’urgence qui n’acceptent pas de les mélanger avec des adultes.

Cette situation est absurde. Ni mineurs aux yeux des départements, ni éligibles au 115, ces jeunes se retrouvent à la rue, avec tout ce que cela comporte comme exposition à la violence, à la misère, aux réseaux… et au froid, en hiver.

Souvent ces jeunes forment des recours face aux décisions des départements, et attendent plusieurs mois que le juge des enfants statue sur leur situation. Et même s’il n’existe aucune statistique fiable, une part non négligeable d’entre eux voit sa minorité reconnue.

Un large collectif d’associations, dont France terre d’asile, appelle à la mise en œuvre d’un principe de « présomption de minorité » : cela voudrait dire que tant que le juge ne s’est pas prononcé, le jeune est « présumé mineur », donc reste hébergé par l’ASE.

Toutefois, cela nécessiterait que des moyens soient transférés de l’État vers les départements, car ils ne pourraient pas assumer seuls, financièrement. Il est aussi nécessaire d’augmenter les moyens des juges pour juger plus vite.

En attendant il faut trouver une solution pour ces jeunes, pour les sortir de cette zone grise et leur trouver un toit le temps du recours. Pour ces jeunes à Paris qui ont dû vivre dans la rue pendant plusieurs mois et pour tous les autres, car ce n’est pas un sujet parisien : toutes les métropoles y sont confrontées.

C’est pourquoi nous appelons à l’ouverture de centres d’hébergement dédiés pour ces jeunes en recours. L’État n’y est légalement pas obligé. Mais il n’y a, très pragmatiquement, pas d’alternative, pour remplir ce vide juridico-administratif qui conduit ces jeunes à la rue.

À Paris, l’État finance des places dédiées depuis quelques années. D’autres territoires y réfléchissent. C’est indispensable, et bien la preuve que le besoin est réel. Mais leur nombre est insuffisant et surtout le sujet fait l’objet d’inutiles renvois de balles entre acteurs.

L’hiver approche, les arrivées en France repartent à la hausse. Le nombre de personnes à la rue va augmenter très vite si nous ne pensons pas rapidement de nouvelles solutions de mise à l’abri. Des solutions existent. Nous aimerions entendre qu’elles sont désormais prioritaires.